P’tit pas

Vous qui souhaitez intégrer une association de randonnée sachez que vous devrez laisser toute dignité à la porte de cette confrérie (vous remarquerez que dans confrérie il y a con, tant il est vrai qu’il faut être un peu … dérangée, pour aller crapahuter des heures sous la pluie (il pleut TOUJOURS en randonnée) et conséquemment dans la boue, alors que l’on serait mieux à s’empiffrer de pistaches salées et de caca-colo devant Marimar, après voir traîné au lit jusqu’à pas d’heure.

Attendu que vous présenterez une mine de déterrée les matins de randonnée, vu que vous aurez eu une nuit trop courte, passée essentiellement à consulter fiévreusement votre radio-réveil toutes les heures, ce qui ne vous empêchera pas d’arriver quand même en retard au bus, et subir les quolibets des anciennes qui sont passées, par le passé, elles aussi, sous les fourches caudines des à-l’heure, anciennes qui ont, elles, le teint lumineux, l’œil clair, l’haleine fraîche et le mollet agile.

Attendu que vous allez rendre votre quatre-heure (vous êtes réveillée depuis trois heures, ne l’oublions pas !) dans le bus, car il est bien entendu que les départs de randonnées ne se situent point sur la côte au bout d’une trajectoire rectiligne, mais en altitude, après quatre cent cinquante trois virages et demi en épingles à cheveux. Mais là, vous pourrez vous venger des moqueuses (de ci-dessus) en restituant de préférence sur elles. Ne boudez pas un des derniers plaisirs de la journée qui commence, il n’y a pas de raison que vous seule sentiez le rendu pendant toute randonnée.

Attendu que dans le bus vous subirez le zouk-love jusqu’à l’écœurement, le machiniste croyant vous faire plaisir, haussera le volume de son bis-track. S’il décelait alors quelque réserve parmi l’assistance, il changera fort civilement sa zizique des pôles (aux sons) et vous fera goûter les facéties de Freedom. Jusqu’à la nausée. Oui vous l’aurez, nonobstant l’arrêt de la TSF (Tout Sauf Freedom), tout le monde ne pouvant s’asseoir à la première rangée, de plus insomniaques que vous ont squatté les meilleures places. S…pes ! Et quant à celles qui n’auront pas les yeux dans le bleu, parce qu’elles ne seront pas du bon côté du bus, elles pourront toujours admirer votre teint joliment verdâtre, affichant le sourire en coin des gens supérieurs. Attendez, elles feront moins les malignes tout à l’heure sur le sentier, quand elles devront rendre… compte elles aussi !

Attendu que dès que vous serez sur le sentier, vous vous étalerez dans la première flaque de boue venue (il pleut TOUJOURS sur les sentiers, ne l’oublions pas ! ), avec grâce diront vos hypocrites compagnes de route qui ont immortalisé l’instant au moyen de leurs I-Phone (prononcer Aïe Phone, pour faire smart !), mais vous savez pertinemment qu’il n’en est rien et que vous allez faire la joie de la progéniture des vidéo-gagueuses péis dès leur retour à la case. D’accord la boue graisse, mais ne remplacera jamais le Clarins multi-active day cream protection.

A propos d’eau (il pleut TOUJOURS en randonnée, continuons à ne pas l’oublier), bonjour les cheveux filasses, assortis d’ailleurs à votre mine (voir plus haut). Vous sortirez alors l’arme fatale (pour votre look), LE PONCHO ! Et, là, d’Esméralda vous virerez illico Quasimodo.

Attendu que lorsque vous ne serez pas sur les fesses (le plus souvent), vous devrez ramper à quatre pattes (toujours) afin de ne point refaire connaissance avec la boue-graisse, vous avez déjà été présentées.

Attendu que vous devrez faire vos menus besoin au su du groupe, vu que vous aurez préalablement signalé au monde entier que vous allez faire un petit pot-pot (il est d’ailleurs curieux que personne ne fait jamais le gros pot-pot chemin faisant ! ) en déposant votre sac à dos au beau milieu du sentier, telle une borne rutilante signifiant que vous allez en poser une autre bien à vous, pas très loin. Heureuses les constipées chroniques !

Attendu que vous devrez manger des choses un peu rassises debout (elles ont été achetées la veille et pas la moindre Marmite à moins d’une journée de marche, et notre fidèle amie la boue nous empêchant de prendre nos aises) avec les doigts, ayant le gîte, vous ne vous êtes pas soucié du couvert, doigts que vous ne pourrez laver ensuite, faute de Foaming body exfoliator, conçu pour toutes les peaux, même les plus sensibles.

 Attendu qu’arrivée à destination vous allez connaître les joyeusetés de la douche glacée (si on a bien suivi on se rappellera qu’il pleut TOUJOURS en randonnée, et que, subséquemment, les cellules photo-voltaïques des chauffe-eaux des gîtes n’ont pas été chatouillées par le moindre rayon solaire !) et les gaîtés des dortoirs surpeuplés où tout le monde ronfle, SURTOUT VOUS, aux dires des autres…

… Que si vous êtes prête à accepter toutes ces mortifications, alors vous serez des nôtres.

* Post-scriptum :

À lire au féminin, attendu qu’il y a beaucoup plus de femmes que d’hommes (alléluia ! ) sur les sentiers.

Ray P.